C'est donc tout sauf une surprise ce soir au Barker Hangar de Los Angeles lors de la cérémonie des NBA Awards 2019, où l'ailier camerounais des Raptors de Toronto Pascal Siakam vient d'être élu Most Improved Player (MIP), autrement dit joueur ayant le plus progressé de la saison en NBA. Il devance ainsi les deux meneurs américains D'Angelo Russell (Brooklyn Nets) et De'Aaron Fox (Sacramento Kings).
Champion NBA 2019 avec les Raptors de Toronto, Pascal Siakam succède ainsi au meneur des Indiana Pacers, Victor Oladipo né aux États-Unis de parents nigérian et Sierra leonais. Le natif de Douala devient ainsi le premier joueur formé en Afrique à avoir été distingué MIP de la saison.
"Je remercie Dieu en premier lieu, rien ne serait possible sans lui. Merci à la NBA. Ma famille est là aujourd’hui. J’ai hérité de l’éthique de travail de ma mère, qui a toujours travaillé dur sans jamais se plaindre. Je pense aussi à mon père, qui n’a pas pu être là ce soir" [il est décédé quand Siakam était plus jeune, ndlr]. Il avait ce rêve fou, et personne ne le croyait au pays, et aujourd’hui c’est devenu réalité.
"Je remercie également les Raptors, qui m’ont fait confiance. Mes coéquipiers, les champions NBA. Je suis heureux d’avoir fait partie d’une équipe aussi géniale."
Pascal Siakam a également profité de sa présence sous le feu des projecteurs pour adresser un message aux jeunes joueurs d’Afrique, qui, comme lui fut un temps, rêvent de NBA et de grandeur :
"Un petit message aux gamins africains : je sais que c’est difficile, que ça a l’air impossible, mais je veux juste vous dire de croire en vos rêves et de travailler dur. Ça a toujours l’air impossible jusqu’à que ce soit fait."
Au niveau des voix, aucune contestation possible, avec un véritable raz-de-marée pour Spicy P, qui a notamment obtenu 86 votes sur 100 pour la première place.
Pascal Siakam, lion indomptable
« Spicy P » évolue dans un autre registre. Il est capable de bien défendre mais plutôt en chassant des attaquants loin du cercle. Il a les cannes pour ça. C’était censé devenir son rôle en NBA. Mais il a largement dépassé les attentes. Il ne s’est pas contenté d’une case. Le jeune homme a connu une évolution fulgurante. Lui qui progressait saison après saison depuis son arrivée dans la ligue en 2016 a passé un sérieux cap. Il n’est pas officiellement un All-Star mais il en a le niveau. Il était même plus que ça sur ces finales NBA 2019.
Pascal Siakam a été le parfait lieutenant de Kawhi Leonard offensivement. 19 points et 7 rebonds de moyenne sur les playoffs, à 47% aux tirs. Même presque 20 points à 50% sur ces finales NBA 2019. 26 points et 10 rebonds sur ce Game 6 triomphal avec 3 paniers primés. C’est d’ailleurs lui qui a marqué le « game winner » en prenant le dessus sur Draymond Green en un-contre-un sur la dernière action.
Pascal Siakam a tout simplement explosé lors de sa troisième saison NBA. Cela s'est vu de manière spectaculaire dans les stats, mais aussi dans la dimension qu’il a pris au sein de l’une des meilleures équipes de toute la NBA. Siakam est devenu un élément clé des Raptors, un titulaire indiscutable, et il aurait pu être sélectionné pour le All-Star Game 2019, mais nul ne fait aucun doute qu'il sera bientôt.
En 2011, la chance frappe à la porte du joueur, qui est sélectionné pour participer au camp estival organisé par Luc Mbah à Moute, un autre joueur camerounais évoluant aux Etats-Unis. Cette expérience, qui place Pascal Siakam dans le circuit, le conduit vers un autre camp en Afrique du Sud, avant qu’il obtienne une bourse pour les Etats-Unis.
« Il est sélectionné au sein des Raptors contre l’avis de nombreux observateurs de la NBA qui ne croient pas en lui »
Le MIP de la saison est promis à un bel avenir. Il n’a pas encore l’étoffe d’une première option. Il profite beaucoup de la présence de Kawhi Leonard et de l’attention que la défense porte à la superstar des Raptors. C’est ainsi qu’il a pu faire son carton lors du premier match des finales (32 pts). Mais tant mieux. Il est justement la seconde lame et ça lui convient parfaitement à ce moment de sa carrière.
« Aucun autre joueur n’a progressé autant que ce gamin »
Tout au long de cette saison 2018-2019, Pascal Siakam a donné tort à ceux qui doutaient de lui. « Aucun autre joueur n’a progressé autant que ce gamin, aucun joueur n’a eu autant d’impact sur son équipe. Il n’a cessé de s’améliorer, ne serait-ce qu’au fil de ces vingt derniers matchs », confiait, Nick Nurse, l’entraîneur des Raptors de Toronto, en avril dernier.
Au Cameroun, où le football est roi, son ascension force le respect jusqu'au sommet de l'état. Le ministre des sports et de l’éducation civique a envoyé une lettre de félicitation et d’encouragement au jeune ailier. Depuis son compte Twitter, le président de la république Camerounaise Paul Biya lui a également adressé un message de félicitations.
Au sein de la Fédération camerounaise de basket-ball (Fecabasket), on pense que voir Pascal Siakam jouer du haut de ses 2 m 08 encouragera d’autres jeunes à aimer le basket et à en faire leur passion, malgré le manque d’infrastructures et les éternels problèmes financiers qui minent ce sport.
« Il est certain que sans l’opportunité des camps, Pascal aurait végété comme ses amis restés au Cameroun », assure Camille Njoh Ekidi, secrétaire général de la Fecabasket. Avant d’ajouter, plus joyeux : « On sait que ça va être difficile, cette finale. Mais tout le Cameroun est derrière Pascal Siakam, c’est notre fierté actuellement. »
#Statistiques individuelles 2018-19 : 16,9 points, 6,9 rebonds, 3,1 assists et 0,9 interception à 54,9% au tir et 36,9% du parking en 31,9 minutes.
# Résultats collectifs : 58 victoires pour 24 défaites, 2ème de Conférence.
Meilleur match de la saison (vs. Washington, le 13/02) : 44 points, 10 rebonds et 3 contres à 15/25 au tir dont 4/5 de loin pour faire regretter les coachs de ne pas l’avoir invité au All-Star Game.
Le champion de D-League 2017 a parcouru du chemin depuis sa Draft, en 27ème position. On connaissait Pascal l’energizer, on connaît désormais Pascal le starter. Et quel starter ! Directement intégré dans le cinq majeur par Nick Nurse, le Camerounais a eu une courbe de progression constante tout au long de la saison. Des statistiques doublées, un hustle et une intensité de tous les instants et des moves de plus en plus tranchants en attaque, "Spicy P" était clairement le favori pour le Most Improved Player et il aurait même pu prétendre à une petite invitation à Charlotte pour le All-Star Game dès cette saison.
Mais Spicy-P a encore le temps pour amasser plus de récompenses. A 25 ans, il se révèle comme l’un des steals de la cuvée 2016. Désormais capable de prendre un match à son compte comme ce fabuleux career-high contre les Wizards ou ce buzzer beater face aux Suns, il est devenu l’un des chouchous du public en NBA. Désolé Kyle Lowry, mais le rôle de lieutenant ne fera même plus débat à Toronto la saison prochaine si les exploits de Pascal Siakam permettent de convaincre Kawhi Leonard de rester au Canada. Même s’il aurait sûrement eu une très belle carrière en tant que prêtre, on ne regrette pas ce changement tardif d’orientation. Entre lui et Joel Embiid, le Cameroun peut déjà proposer l’une des plus belles raquettes du monde en compétition internationale et il ne manque qu’un dernier élément pour former un remarquable Big Three en FIBA. Merci pour tout ce kiff, P !